Série - Our Boys ("Nos Garçons") / Hagai Levi, Joseph Cedar, et Tawfik Abu-Wael

... C'EST QUOI L'HISTOIRE ?

Jérusalem, début de l’été 2014. Ils s’appellent Naftali, Gilad et Eyad. Les plus jeunes ont 16 ans. Le plus âgé, 19. Trois adolescents juifs. Tout Israël les recherche depuis leur disparition, trois semaines plus tôt, enlevés par des inconnus alors qu’ils faisaient de l’autostop. Le pays est au bord de l’explosion. La tension est palpable. La découverte de leurs cadavres dans un champ sert d’étincelle pour le déclenchement d’émeutes violentes dans les rues de la capitale. Les manifestants partent à la chasse à l’homme et appellent à des représailles aux cris de « Tuons les arabes ! » C’est dans ce contexte, en plein Ramadan, qu’un gamin de Jérusalem Est, Mohamed Abu Khdeir, 16 ans, disparaît à son tour. Quelques heures plus tard, son corps ligoté et carbonisé est retrouvé au bord d’une route goudronnée longeant la forêt de pins de la ville dite « trois fois saintes. » Qui est responsable de ce kidnapping et de ce meurtre sauvage ? Comment contenir la rage des Palestiniens et des arabes musulmans israéliens ? Et la fureur en miroir des extrémistes juifs ? Comment maintenir un Etat de droit ? Dans quel camp êtes-vous lorsqu’il faut choisir entre « Eux » et « Nous » ? C’est cette histoire vraie qui mena à une nouvelle Intifada , véritable mécanique infernale que décortique avec méticulosité Our Boys, série israélo-américaine d’abord diffusée sur HBO en 2019 avant d’être disponible en France début 2020. Et personne n’y est épargné. 

... ET C'EST COMMENT ?

Tournée quasi comme un documentaire, en Israël, ponctuée de flashbacks mais aussi d’images d’archives, la série captive, hypnotise et rebondit sans cesse en s’attachant à suivre la traque menée par Simon (Shlomi Elkabetz), un officier du Shabak, le service de sécurité intérieur israélien, pour identifier et arrêter les coupables du meurtre de Mohamed. Impressionnant, émouvant, sont les deux adjectifs qui viennent en tête pour saluer la performance de Shlomi, plus connu comme réalisateur (Le Procès de Viviane Amsalem). Par le regard, son attitude, quelques gestes, il arrive à faire passer tous les états émotionnels que traverse son personnage (indignation, colère, incompréhension culpabilité, etc.), juif traquant d’autres juifs, considéré comme un traître par une partie de sa communauté, tiraillé entre sa famille, sa hiérarchie, et son métier, sa mission d’enquêteur impartial. Découpé en dix épisodes, allant des premiers faits jusqu’au procès, Our Boys se regarde comme un thriller halluciné et permet au téléspectateur de se plonger dans la géographie d’un pays mais aussi la tête de ceux qui y vivent et meurent. Accusée d’antisémitisme par le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyhaou, qui a appelé à la boycotter lors de sa diffusion en Israël, la série s’impose comme un modèle d’équilibre, ne jugeant jamais, mais au contraire donnant à penser, à réfléchir. Une vraie perle noire.

Frédérick Rapilly

Cote d'amour = 80 %

Série (1 saison). Créée par Hagai Levi, Joseph Cedar, et Tawfik Abu-Wael. 10 x 45 mn. En diffusion (2020) sur Canal +, tous les jeudis à 20.55. Disponible sur MyCanal.