François-Xavier Dillard : « J’ai beaucoup écouté Mozart pour Réveille-toi ! »


INTERVIEW. Lunettes sur le nez, grand sourire, crinière coiffé décoiffé, François-Xavier Dillard débarque un peu en retard (bouchons, bouchons !) dans le bar de l’hôtel Lutetia, à Paris. Un endroit prestigieux mais le cadre est un peu décevant. Impersonnel. Couleur taupe, passe-partout ? Nous nous rendrons compte plus tard que nous nous sommes trompés de quelques mètres, et qu’il aurait fallu opérer une petite translation pour profiter du (vrai) bar Joséphine rénové et de ses cafés à 7 Euros. Mais bon, nous sommes là pour nous entretenir. Avec cinq romans parus depuis 2011, dont le dernier, le surprenant Réveille-toi !(paru au printemps aux éditions Belfond), François-Xavier fait entendre sa voix auprès des amateurs de polars et de thrillers (pas loin de 30 000 exemplaires déjà pour Fais-le pour maman, en version poche). Des romans inquiétants, quelque part entre Harlan Coben et Barbara Abel, où du quotidien peut surgir l’indicible, l’horreur et le mal.

 

Où, et comment est née l’idée de Réveille-toi ! ?

Devant ma télé. Je regardais un reportage d’Envoyé Spécial sur France 2 autour du sommeil, et on y voyait cette personne qui faisait de terribles crises et qui s’agitait violemment tout en dormant. Je me suis dit qu’il y avait un potentiel pour un livre. Je me suis intéressé au sujet, et très vite, je suis tombé sur une histoire au Canada d’un type qui avait assassiné sa belle-mère pendant une crise de somnambulisme et que la justice avait acquitté. En général, je trouve l’inspiration pour mes romans dans des faits-divers. Parfois, j’ai des surprises. Au cours d’une dédicace, dans le nord, un lecteur m’a alerté en me disant, à propos de Fais-le pour maman : « Vous savez que ça s’est passé ici ? »

Comment travailles-tu ? As-tu besoin de faire des recherches ?

Oui, j’en fais. Un peu, pas trop. Mais je sens écrivain pas enquêteur. J’appelle des toubibs pour vérifier des choses, je peux visiter un endroit particulier pour une scène, rendre une atmosphère, mais au risque de décevoir nombre de lecteurs, il y a aujourd’hui Google Maps. Je consulte beaucoup. Et je me demande bien comment faisaient les écrivains avant Internet.

Quand es-tu devenu un auteur ?

Au départ, je me voyais dramaturge. J’ai donc écrit une pièce de théâtre, baptisé Best-Seller, quand j’habitais à Paris. Ca racontait l’histoire d’un éditeur qui en avait marre de son boulot, surtout de lire des mauvais manuscrits, et qui tombait sur celui, extraordinaire, d’une jeune femme de 20 ans. Voilà pour le début… Je voulais la monter, la faire produire, etc. Je l’avais adressée à Amélie Nothomb qui m’avait téléphonée. Tout semblait bien parti. Mais rapidement je me suis aperçu que le ticket d’entrée était incroyablement élevé pour une pièce de théâtre. Hors de ma portée. Je me suis alors dit : « Je vais écrire des livres. » 

Est-ce que tu te souviens de tes notes au bac de français ?

Oui… Un 17 à l’oral et un 13 à l’écrit. J’étais un lecteur forcené, je dévorais deux livres par semaine. J’avais de l’asthme, j’étais un enfant malade et quand je rentrais chez moi, je me plongeais dans des récits qui m’emmenaient en voyage pendant que ma mère, professeure de piano, jouait dans la maison. Ca crée un atmosphère, non ? Je me souviens du Cycle de Fondation d’Isaac Asimov par exemple. J’avais la chance d’avoir beaucoup de livres autour de moi, et des parents qui lisaient.

Je te demande de fermer les yeux et d’essayer de te souvenir du premier livre ou de la première scène qui t’ait touchée ?

Ce qui me vient en tête, c’est La Fée Carabinede Daniel Pennac. Et aussi L’Etrangerde Camus : « Et c’était comme quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur… »

Et un livre qui t’accompagnes ou que tu offres régulièrement ?

Celui que je relis régulièrement, c’est La Routede Cormac McCarthy et celui que j’offre, c’est Rien ne s’oppose à la nuitde Delphine de Vigan. L’écriture est sans pathos… Je l’ai offert un nombre de fois incalculable.

Pourquoi écris-tu ?

C’est l’expression artistique où tu as le plus de liberté. Aucune contrainte. Aucune limite. Tu peux tout imaginer. J’essaie juste d’être crédible. J’ai un rapport très simple à l’écriture. Il n’y a aucune souffrance... Sauf quand je me relis. Sinon j’arrête, je reprends. Comme je travaille à côté, je profite du moindre instant où je me sens bien. Il m’arrive d’écrire en voiture avec ma femme au volant. 

Où écris-tu d’habitude ?

J’ai un petit bureau dans notre chambre à coucher. Il est face à la fenêtre et donne sur une cour. Ma femme pose des trucs dessus. Il n’y a pas de post-it, pas de note. Juste une page ouverte sur l’ordinateur. Quand j’y suis, j’écris un court chapitre de 5 à 6000 signes. C’est mon rythme. Un par jour. J’écris court. Cela donne un rythme qui va avec le thriller, le polar. 

As-tu des rituels ?

Pas vraiment. Aucun même. J’écoute de la musique… Classique. Du baroque, du Bach, du Haendel. Avant, j’ai fait de la trompette. Ceci explique peut-être cela. Pour Réveille-toi !, j’ai beaucoup écouté Mozart. La musique ne me dérange pas, elle m’accompagne plutôt. C’est sa fonction dans mon processus d’écriture : une compagne.

Comment construis-tu tes personnages ? Découpe-tu des photos dans les magazines ?

Non, je m’inspire de gens que je connais. Parfois, du bureau. Des fois, je leur demande. Des fois, non. Je reprends surtout des traits de personnalité. Mais j’invente pas mal de choses. Il peut m’arriver aussi de m’inspirer de mon éditrice ou de mon attachée de presse, mais elles ne le savent pas forcément. Pour moi, dans l’écriture, mon lecteur est comme un co-auteur. Je lui laisse une part d’imagination dans les personnages en ne les décrivant pas de façon trop précise non plus. 

Quand tu commences, tu sais où tu vas ?

Non, je n’ai pas de plan. Je raccroche les wagons au fur et à mesure. Si je savais la fin, ça ne m’intéresserait plus. A mon éditrice (Céline Thoulouze), je fais semblant de raconter quelque chose que je maîtrise avec un début, un milieu et une fin, mais c’est du pipeau. Et elle le sait ! 

Et as-tu une idée de ton prochain roman ?

Oui, il s’agit d’un jeune garçon : Max. Il a 13 ans. C’est un enfant malade. Il vit à Paris et il prend des cours de piano avec une professeure…
Ca semble familier, non ?

Oui. Je sais… OK, j’avoue. Il y a un petit peu de moi dedans. Dans l’immeuble où il vit, il y a un éditeur, genre chic qui travaille pour Gallimard. Celui-ci part en vacances en laissant son appartement ouvert. Max s’y glisse et tombe sur une femme allongée, un robot en fait. Une situation qui va le choquer. Il n’aura de cesse alors de tout tenter pour que sa prof de piano tombe amoureuse de cet éditeur. A cela, il faut rajouter un contexte qui est celui des attentats à Paris.

Quand sera-t-il prêt ?

C’est prévu pour début 2020.

Propos recueillis par Frédérick Rapilly, en octobre 2018 

 

 

François-Xavier Dillard : « J’ai beaucoup écouté Mozart pour Réveille-toi ! »
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Personnaly © 2014 -  Hébergé par Overblog