Franck Thilliez / Pandémia
-
Spécial Confinement (Pendant)
... C'EST QUOI L'HISTOIRE ?
Le tueur est... Minuscule. Le tueur est... Multiple. Le Tueur est un... Virus. Une saloperie de grippe non identifiée, disséminée à dessein par "L'Homme en Noir" et ses affidés. Les premières victimes sont des oiseaux, trois cygnes découverts en Baie de Somme. Amandine, une scientifique travaillant pour le GIM (Groupement d'Intervention Microbiologique), est dépêchée sur place de toute urgence. En même temps, dans les environs de Paris, en forêt de Meudon, le corps d'un homme frappé de dizaine de coups, le visage couvert d'entailles, est signalé. Son chien qu'il était parti promener gît à ses côtés. Le lieutenant Sharko, sa compagne Lucie, et le reste du groupe Bellanger sont chargés de cette enquête peu ordinaire. D'autant que celle-ci va révéler rapidement l'existence de plusieurs cadavres dissimulés au fond d'une étendue d'eau. Pour quelles raisons ? Sharko s'interroge, pose des questions alors qu'autour de lui, tout le monde semble tomber malade à (quasi) en crever. Ses recherches vont l'amener sur la piste d'un inconnu, plutôt une silhouette, se promenant sous terre, dans le réseau des égouts parisiens, vêtu d'une étrange manière. Comme s'il portait un bec d'oiseau. Tout cela mis bout à bout n'a guère de sens, mais quelque chose ou plutôt quelqu'un relie ces deux affaires, celle des cygnes morts et celle du meurtre de Meudon.
... ET C'EST COMMENT ?
On retrouve avec une certaine appréhension les héros tourmentés d'Angor (et Atomka, et Gataca...), dont le personnage si attachant de Camille, la gendarme au coeur greffé, qui apparaît ici en périphérie de l'intrigue. L'idée forte de ce roman, un tueur minuscule auquel nul ne peut échapper, est remarquablement documentée par les recherches effectuées par Franck Thilliez auprès de l'Institut Pasteur de Lille, et par une nouvelle venue (encore une personnage féminin) : Camille et sa peau d'albâtre, ses cheveux courts et roux. Bordeline. Complétement obnubilée par la protection qu'elle tente d'offrir à son compagnon, atteint d'une maladie rendant son corps susceptible d'être infecté/affecté par le moindre rhume. Une femme au bord de la crise de nerf d'une certaine façon mais qui va faire basculer le récit, par sa détermination et ses prises de risques. Sharko aussi est près de passer de l'autre côté... Tout aussi borderline. Fragilisé, touché par un drame qui risque d'ébranler tout lecteur fidèle de Thilliez. L'auteur a su ménager un coup de théâtre qui pourrait vous donner envie de l'étrangler (les amateurs de la série d'heroïc-fantasy Game of Thrones comprendront). Nul n'est irremplaçable, nul n'est indispensable ! Infecté, j'ai plongé dans l'histoire qui prolonge efficacement Angor (pour lequel j'ai un faible) mais j'avoue que j'ai un peu décroché - mithridatisé peut-être - lorsque l'intrigue se resserre dans le dernier tiers sur le Deus ex Machina de ce complot géant, L'Homme en Noir. Un "méchant" qui lorsqu'il commence à s'incarner en chair et en os m'a paru un peut trop théâtral, poseur, dans sa manière d'agir et de s'exprimer. Au final, un thriller touffu, ponctué de scènes et d'images qui vous hantent longtemps (notamment un charnier d'animaux en Pologne), qui mélange habilement la réalité scientifique (cf la grippe aviaire, la crise de la vache folle, la dissémination d'Ebola en Afrique...) avec la (presque) fiction. Et si tout cela nous arrivait. Et si tout cela était déjà arrivé ?
Frédérick Rapilly
Cote d'amour = 80 %
THRILLER. Pandémia, Editions FleuveNoir, 644 pages, 21,90 E